La seconde Intifada se déclenche fin septembre 2000, à la suite de la visite d' Ariel Sharon (à cette époque chef du Likoud, dans l'opposition à Ehoud Barak) sur l'Esplanade des Mosquées le 28 septembre 2000. Cette visite, sous haute sécurité, est interprétée comme une provocation par les Palestiniens. Mais cet événement déclencheur ne peut être appréhendé que dans son contexte :
- Un processus de paix israélo-palestinien, initié par les accords d'Oslo, qui se trouve dans l'impasse après l'échec du sommet de Camp David en juillet 2000, et qui laisse penser que l'Autorité palestinienne est impuissante à mettre fin à l'occupation.
- Le retrait israélien du Sud Liban interprété comme un succès du Hezbollah.
- Les luttes d'influence entre les différentes factions du Fatah et du Hamas.
- Un désaccord d'une partie de la population israélienne avec les concessions accordées par le gouvernement lors des sommets de Camp David et de Taba (janvier 2001).
Comme la première Intifada, la seconde met en évidence le rejet de l'occupation et de la colonisation. Mais elle diffère par l'usage des armes et par des attentats (y compris attentats-suicides) contre des civils israéliens. D'autre part les affrontements sont menés « aux lisières des zones palestiniennes autonomes, aux abords des colonies juives, aux points de contrôle de l'armée, comme autant de lignes de front opposant des territoires hostiles » (Nadine Picaudou dans le Monde Diplomatique, citée par Alain Gresh et Dominique Vidal dans Les cent clés du Proche-Orient, p . 303.)
L’escalade, après la provocation de Sharon
Dès le lendemain de la visite de Sharon, à la suite de la prière du vendredi, les Palestiniens lancent des pierres contre la police israélienne qui intervient violemment, faisant 7 morts et des centaines de blessés. Dans les jours qui suivent, les affrontements s'étendent en Cisjordanie et à Gaza. Il s'agit d'une insurrection conduite à la fois par des activistes opposés aux accords d'Oslo (membres du Hamas ou du Djihad Islamique), mais aussi de membres du FPLP ou du FDLP ou même du Fatah. Le mode d'action est la violence contre Israël pour parvenir au retrait des territoires occupés et à la proclamation d'un Etat indépendant. Cadre du Fatah, Marwan Barghouti prend la tête du mouvement. Les violences s'amplifient, et au 10 octobre le bilan est de 90 morts et 2000 blessés parmi les Palestiniens et de 14 arabes israéliens tués lors de manifestations de soutien. Le 12 octobre, deux réservistes israéliens sont lynchés à Ramallah par la foule, épisode diffusé en direct par la télévision italienne. Les premiers attentats suicides ont lieu au printemps 2001. 146 seront recensés en Israël, principalement contre des civils. Le 1er juin 2001, un attentat fait 21 morts et 120 blessés dans une discothèque de Tel-Aviv (principalement des adolescents). Ce sera une des raisons invoquées par le gouvernement israélien pour entreprendre le mur de séparation à partir de 2002.
Avec l'arrivée au pouvoir d'Ariel Sharon en février 2001 la répression s'intensifie. C'est l'Autorité palestinienne et son chef, Yasser Arafat, que l'armée israélienne cherche à détruire.
2002 : L’opération Rempart de Galilée
En 2002, l'attentat de l'hôtel Park de Netanya fait 29 victimes et pousse Israël à lancer l'opération ’Rempart en Galilée’ au printemps 2002 avec comme objectif une réoccupation partielle des territoires sous contrôle de l'autorité palestinienne. Quatre divisions sont déployées ! Il s'agit d'obtenir la capitulation de la population palestinienne, sa renonciation à toute forme de résistance et d'en finir avec les accords d'Oslo. Sur le terrain, l'armée tape fort, très fort : destruction systématique des infrastructures (dont celles financées par l'Union européenne), bombardements des camps de réfugiés, attaques contre des hôpitaux et des ambulances, pillages. Ce sont tous les cadres de la vie matérielle et sociale des Palestiniens qu'il faut détruire. Les combats sont particulièrement violents à Jénine investie le 3 avril. Chars, bulldozers, hélicoptères, missiles sont utilisés. On ne connaîtra jamais le nombre exact de victimes : 48 selon Israël, 52 selon un rapport de l'ONU, plus de 200 selon les Palestiniens. Le siège le plus médiatisé étant sans doute celui de la Basilique de la Nativité à Bethléem dans laquelle s'étaient réfugiés des combattants palestiniens jusqu'au 10 mai.
Début mars 2002, le nombre de morts palestiniens dépasse celui de la 1re intifada : 1 440 sur une période quatre fois plus courte. On dénombre aussi 400 morts israéliens. Le 15 avril, Marwan Barghouti est capturé, inculpé et condamné à perpétuité. Il est toujours en prison. Les violences sont telles que l'administration américaine intervient en proposant la résolution 1397 à l'ONU votée le 13 mars qui mentionne pour la première fois un Etat palestinien. La Ligue arabe propose une normalisation des relations avec Israël en échange de l'évacuation des territoires occupés. Mais rien n'y fait, et les violences de l’armée israélienne se poursuivent. Les bureaux de l'Autorité palestinienne sont bombardés et encerclés, Arafat est littéralement séquestré dans la Muqata de Ramallah ; le siège sera levé en mai, suite à l'intervention américaine. Un nouveau gouvernement est présenté par Arafat le 9 juin.
L'enchaînement de la violence
Mi-juin 2002, Israël commence les travaux de construction du mur de séparation prévu sur une longueur de 350 km pour la première tranche (730 km au total). Les attentats se poursuivent en juin et l'armée israélienne réoccupe la Cisjordanie en représailles. Sous la pression du Conseil National Palestinien (CNP), le gouvernement palestinien démissionne le 11 septembre. Le cycle attentats-représailles se poursuit à l'automne et un nouveau gouvernement est nommé par Arafat le 29 octobre. Une « feuille de route » est élaborée par le Quartet (USA, ONU, UE, Russie) qui doit permettre d'aboutir à la création d'un Etat Palestinien avant 2005. Vaine entreprise qui n'a jamais pris en considération le fait que le gouvernement israélien n'a jamais voulu entendre parler d'une telle perspective. Il faut se souvenir que pour Sharon « les accords d'Oslo sont la plus grande catastrophe qui soit arrivée à Israël ». Sur le terrain, le plan du Quartet ne change rien, et le gouvernement palestinien décide de retarder les élections prévues en janvier 2003, tant que l'armée israélienne sera présente dans les territoires. Fin janvier 2003, le nombre de tués depuis le début de l'intifada se monte à 2856 dont 2169 Palestiniens et 687 Israéliens (source AFP). En un peu plus de 2 ans d'affrontements l'armée israélienne aura arrêté, interrogé et condamné des milliers de Palestiniens, aura assassiné des dizaines de militants par attentats ciblés. Des centaines d'hectares de terre auront été confisqués, des milliers d'arbres fruitiers arrachés, des centaines de maisons détruites.
La recherche d’une issue du côté palestinien
En 2003, les attentats continuent en Israël et dans les territoires occupés, alors que G.W. Bush déclenche le 19 mars la deuxième Guerre du Golfe pour renverser Saddam Hussein. La pression américaine s'intensifie. Le 18 mars, Arafat nomme un premier ministre ( condition imposée par les USA pour la publication de la feuille de route), ce sera Mahmoud Abbas. La « feuille de route » est publiée le 30 avril : les responsables politiques palestiniens doivent « mettre fin au terrorisme » et « instaurer un régime démocratique fondé sur la tolérance et la liberté ». Quant à Israël, il doit faire le nécessaire pour qu' « un Etat palestinien démocratique soit établi » et donc démanteler ses colonies. Israël fait semblant de jouer le jeu ; les premiers ministres Ariel Sharon et Mahmoud Abbas se rencontrent le 4 juin afin de lancer cette « feuille de route ». M. Abbas négocie aussi avec le Hamas afin de parvenir à stopper les attentats. Fin juin, le Hamas accepte une trêve, il sera suivi par le Jihad islamique puis le Fatah et le FPLP. Sur le terrain, la tension reste palpable, et dès août le Hamas met fin à la trêve suite à une opération israélienne à Gaza. De son coté, Israël poursuit ses attaques ciblées contre des responsables palestiniens. Sharon annonce alors, en février 2004, vouloir évacuer les colonies de Gaza. Ce plan est approuvé par les USA et le Quartet, mais rejeté par le Likoud. Le 14 mars, un attentat à Tel-Aviv, revendiqué par le Hamas et la Brigade des Martyrs d'Al Aqsa fait 14 victimes. En représailles l'armée israélienne tue le leader spirituel du Hamas, le cheikh Yassine le 22 mars (après une attaque ciblée ratée le 6 septembre 2003) et son successeur le 17 avril. Le projet de retrait des colons de Gaza est adopté le 6 juin. Après la Cour Internationale de Justice, c'est l'ONU qui condamne le Mur de séparation et ordonne sa destruction... sans effets.
2004 : sortie de l’Intifada
Yasser Arafat, dont la santé s'était détériorée, meurt à Paris le 11 novembre 2004 dans des circonstances toujours assez mystérieuses ; la nomination de Mahmoud Abbas, adversaire de la militarisation de l'Intifada, change aussi la donne. Un certain consensus pour mettre fin à l'intifada, ou du moins pour une accalmie afin de donner une chance à la négociation, se dégage entre toutes les organisations palestiniennes. Quant à Ariel Sharon, il est victime d'une attaque cérébrale début janvier 2005 qui l'élimine définitivement de la scène politique. Ehoud Olmert lui succède. Sans doute la société palestinienne est-elle fatiguée. L'occupation et la répression engendrent la résistance, et souvent la violence, et aussi de la haine, du désespoir... et des attentats. S'ils sont perçus majoritairement par les Palestiniens comme un moyen de rétablir l'équilibre face à la violence de l'armée israélienne et de l'occupation et, à leurs yeux, légitimés par le désespoir qui les envahit face à l'impasse politique dans laquelle ils sont plongés et à leur solitude sur le plan international, en revanche pour l'opinion internationale et les gouvernements occidentaux les attentats constituent une forme de terrorisme qu'il faut condamner. Ils contribuent à isoler les Palestiniens et l'Autorité, malgré ses condamnations régulières de ces actes.
Le bilan de la seconde intifada reste plus que mitigé du point de vue palestinien : « la militarisation de l'insurrection a abouti à son isolement international ; la violence de la réaction israélienne a affaibli non seulement l'Autorité palestinienne, mais toute la société ; les attentas-suicides ont creusé un fossé profond entre les populations israélienne et palestinienne. En revanche, elle a prouvé le degré de résistance des Palestiniens et leur refus de toute solution qui ne prendrait pas en compte leurs droits » (A. Gresh et D Vidal, op. cit.). Le relatif consensus sur la fin de l'intifida ne saurait faire illusion : le peuple palestinien n'est toujours pas disposé à accepter moins que la création d'un Etat en Cisjordanie et à Gaza avec Jérusalem-Est comme capitale.
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