Les élections municipales réprésentent un temps fort démocratique dans les territoires. C'est l'occasion pour les habitants de faire entendre leurs voix et pour les mouvements sociaux de mener des campagnes de plaidoyer qui ont un impact sur l'agenda politique. Aussi, nous avons décidé de consacrer la seconde partie de la journée sur le municipalisme à des ateliers sur le sujet.
L'approche des prochaines élections municipales de 2020 en France était dans toutes les têtes. Les participants ont ainsi souhaité structurer leurs actions en organisant des ateliers autour de trois étapes : avant, pendant et après les élections.
Chaque tradition municipaliste a un rapport spécifique aux élections. Le communalisme révolutionnaire n'a jamais rejeté les élections municipales en tant que telles même si s'est développée au fil du temps une forte critique de l'électoralisme. Toutefois, le municipalisme libertaire de Murray Bookchin s'est déclaré plutôt favorable aux élections municipales. Quant aux courants du socialisme municipal et du municipalisme libéral, ils se sont pleinement investis dans la participation aux élections municipales.
Les expériences municipalistes de ces dernières années s'inscrivent clairement dans une tendance à faire des élections municipales des temps forts de la démocratie locale. Il se dégage des expériences récentes que les élections municipales sont l'occasion de rassembler les mouvements sociaux et les partis politiques qui souhaitent mener un projet de transformation locale.
Pour certains, les mois qui précèdent les élections municipales favorisent l'action à l'échelle des quartiers pour comprendre et écouter les habitants. Ce travail à l'échelle des quartiers peut s'inspirer de diverses méthodes comme le community organizing ou les pratiques d'éducation populaire. Il s'agit par exemple de faire du porte-à-porte pour repérer des sujets concrets et susciter des pratiques d'auto-organisation.
Les participants au Commonscamp ont insisté sur la nécessité d'élaborer un langage commun et d'éviter les discussions trop théoriques. Cette phase de mobilisation est basée sur l'écoute des besoins et des intérêts des habitants.
L'articulation entre les différentes mobilisations est une étape importante et délicate. Il existe toujours une grande hétérogénéité entre les mouvements. Pour susciter du commun, il est nécessaire de construire une unité autour de quelques sujets qui font consensus. La construction d'un projet commun ne doit pas seulement se faire ’contre’ mais également ’pour’ un projet partagé. L'enjeu du nouveau municipalisme est de construire des alternatives.
Le municipalisme vise à l'émergence d'un nouveau sujet politique pour mettre en avant les questions sociales, environnementales et démocratiques. La connaissance de l'histoire du territoire est essentielle pour la construction d'un programme. La priorisation des problèmes doit se faire en fonction du public présent et des caractéristiques locales. L'expérience de Saillans montre une voie originale : la mobilisation des élections se construit sur une méthode commune et la construction du programme se fait après les élections.
Lors du second atelier, les participants ont imaginé une stratégie pour mener une campagne municipaliste pour une ville de 30 000 habitants. Le point de départ était le suivant : la municipalité en place n’est pas satisfaisante et les citoyens vont donc monter une liste participative. Voici les propositions qui sont ressorties :
1- Ecrire ce qui nous relie (valeurs), pour pouvoir communiquer (charte, manifeste).
2- Ecrire une charte de fonctionnement du collectif (mode de gouvernance).
3- Remplir des cahiers de doléances recueillies en porte à porte ou déambulation. Recenser et faire le diagnostic des besoins et colères en assemblée.
4- Mettre en place des outils d’accès au travail du groupe : accès facilité par le numérique et un lieu physique.
5- Organiser des temps de rencontre festifs et témoignages dans différents lieux publics.
6- Faire vivre un lieu de rencontres et d’échanges.
7- Communiquer en externe sous format papier et numérique (infos élargies et mémoire).
8- Cartographier les enjeux et acteurs de la ville.
9- Récolter les données statistiques (ABS) de la ville et analyse.
10- Contacter les acteurs associatifs et les collectifs locaux (sondage et adhésion et définition des rôles).
11- Créer un récit commun.
Ces premières propositions sont à compléter avec d'autres idées puisqu'une campagne municipale nécessite aussi une équipe, une stratégie de financement, une stratégie de communication, un calendrier de campagne, des assesseurs...
Le municipalisme est une forme d'organisation politique et démocratique à l'échelle municipale. Tout l'enjeu n'est donc pas seulement de reprendre le pouvoir en gagnant une élection municipale mais aussi de transformer les institutions avec les citoyens.
On ne rend pas toujours compte des contraintes qui pèsent sur le fonctionnement d'une municipalité. Comment éviter la prise de pouvoir des élus ? Comment organiser les services publics ? Comment travailler avec l'administration ? Comment composer avec les contraintes réglementaires et budgétaires ? Comment dépasser les contraintes liées aux transferts de compétences et aux différentes échelles institutionnelles ?
Si les participants n'ont pas répondu à toutes ces questions, ils ont formulé quelques pistes à approfondir. Tout d'abord, il semble nécessaire de faire émerger de nouvelles méthodes démocratiques de gouvernance qui soient communes aux citoyens, aux élus et aux techniciens. Ces nouvelles méthodes nécessitent de la formation pour modifier les pratiques. Il a ensuite été proposé de s'inspirer des expériences des communs. Il a été également mentionné l'importance d'agir sur le cadre légal et normatif pour obtenir des marges de manoeuvre.
Dans cette seconde partie, nous avons rendu compte de la seconde journée du commonscamp sur le municipalisme. L'étape 5 était consacrée à un éclairsissement de ce qu'est le municipalisme et de ses racines historiques. Dans l'étape suivante, nous avons exposé plusieurs expériences récentes menées à Valencia, Saillans et Grenoble. A travers ces exemples, nous avons relevé les liens profonds entre les nouvelles coalitions municipales et les mouvements sociaux.
Pour cette dernière étape, nous avons fait part des réflexions des participants vis à vis des élections municipales. Quelques enjeux ont été relevés sur ce qui se passe avant, pendant et après les élections. Il serait nécessaire d'approfondir ces premières pistes, en particulier en vue des prochaines élections municipales de 2020.
Cette journée s'est terminée par une nouvelle séance du Voyage Transversal.